Il existe une chaumière

Juste à l'orée d'un bois

Où vit une sorcière

D'au moins cent ans, je crois.

Cette vieille sorcière

A comme seul ami

Comme unique compère

Son balai chéri

Il est aussi vieux qu'elle

Même plus vieux, qui sait

Il est resté près d'elle

Ces cent dernières années.

Même sa première verrue

Lui, le premier l'a vue

Et pour son premier sort

Ils ont valsé dehors

Aux fenêtres des enfants

Ils voltigent souvent

Elle rit de leurs cauchemars

Lance des sorts, au hasard.

Et quand la lune est pleine

Prestement il l'emmène

Voler au firmament

C'est doux et excitant.

Mais c'est quand même bien long cent ans

Le balai vole plus lentement

Il tressaute bien souvent

Il semble qu'il ait fait son temps

Il perd même des poils, c'est dire !

La sorcière ne veut plus sortir

Elle préfère le ménager

Que ferait-elle sans son balai ?

Voilà pourquoi on ne voit plus

La vieille sorcière au nez crochu

Chevaucher le soir son balai

Il dort près de la cheminée.

Quand le soir au ponant s'étire cramoisi

Et semble sangloter des larmes écarlates

La vigne à des reflets de grappes qui éclatent

Au gré du vent d'automne et de sa fantaisie.

Lorsque s'en va l'été avec les hirondelles

Quand la pluie à cessé de battre le pavé

Voici venu le temps de récolter le miel

Voici venu le temps du grain qu'il faut presser.

Comme une fiancée, la voici qui s'apprête

Grain à grain, feuille à feuille affinant son trousseau

Dans les harpes du vent, les Muses font la fête

La noce sera belle et le monde si beau.

Quand le vin coulera si rouge, si vermeil

Maquillant l'horizon de doux reflets carmin

La vigne dansera dans les bras du soleil

Qui la dévêtira de sa robe de satin.

Et ils s'étourdiront au nectar de la treille

Charmés et envoûtés par le chant des grillons

De cet amour, naîtront d'autres grappes vermeilles

Qui reviendront griser la ronde des saisons.

Cypora Sebagh